Oruro
Le lac Poopo est en voie d’agrandissement. Mais le tracé du chemin de fer a été oublié. C’est au pas, dans un mètre d’eau, que le train gagne la ville.
La beauté pure de l’altiplano des grands vents sans fin, des touffes d’herbe à lamas couchée et ondulante, des villages parsemés, est coupée brutalement par la laideur de cet assemblage de bicoques, et la misère des bidonvilles enveloppés de poussière.
Oruro se croit beaucoup. On nous reçoit avec une certaine commisération pour nos sacs à dos, les pantalons d’Isabelle et mon habillement sans cravate. Les chambres du meilleur hôtel sont néanmoins identiques à celles de Sucre, alors que leur prix ne l’est pas. Pour une douche chaude, les bains publics nous sont aimablement indiqués : seulement à deux rues de là.
Nous faisons la connaissance d’un cholo (métis), propriétaire de plusieurs mines, représentant le gouvernement. Outre deux voitures américaines dernier modèle et une Mercedes, il possède une femme, huit enfants et cinq maîtresses ; au volant, il cherche délibérément à écraser les Indiens, tout en riant et en fumant des cigarettes extra-longues. L’imposante chevalière de diamant au doigt, il crache chaque fois qu’il voit un Indien, et sur lui si possible. Sa conversation : les femmes et les Etats-Unis.
Les billets changés, nous montons dans le train qui doit nous ramener au Chili.